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Plus de peur que de mal. Le premier semestre s'achève sur de bonnes performances sur les marchés actions, y compris aux Etats-Unis, qui retrouvent leurs plus hauts, des primes de crédit revenues proches de leurs niveaux les plus serrés et des gains sur les emprunts d'Etat américains.
"Le deuxième trimestre a été l'un des plus tumultueux de ces dernières années, même si la performance de la plupart des actifs ne le laisse pas présager, relève Henry Allen, stratégiste macro chez Deutsche Bank, dans une note publiée mardi 1er juillet. Les turbulences ont débuté après l'annonce de droits de douane américains réciproques, qui ont vu le S&P 500 enregistrer sa cinquième plus forte baisse sur deux jours depuis la Seconde Guerre mondiale."
Début avril, l'annonce par Donald Trump de tarifs douaniers réciproques bien plus élevés qu'anticipé, avec pour risque une récession aux Etats-Unis, a provoqué un vent de panique sur les marchés. Les actions ont lourdement corrigé, les primes de risque crédit se sont fortement écartées et le pétrole a chuté (celui-ci est resté très volatil au cours du semestre, notamment en raison des risques géopolitiques). La volatilité sur les marchés actions a bondi à un niveau pas vu depuis le début de la crise du Covid en mars 2020. Les investisseurs n'ont même pas pu trouver refuge dans les emprunts d'Etat, notamment américains, qui ont baissé sur le risque inflationniste des tarifs douaniers, tandis que le dollar a dévissé sous le coup de la politique économique du président américain erratique et incompréhensible. La seule valeur refuge semblait être l'or, à de nouveaux sommets.
Mais Donald Trump a rapidement été contraint de faire machine arrière. Alors que les marchés de taux américains étaient au bord d'une crise majeure (le taux à 30 ans américain a bondi de près de 40 points de base, soit 0,40 point de pourcentage, en deux séances et dépassé 5%), celui-ci a annoncé un moratoire de 90 jours sur les droits de douane réciproques. Un moratoire jusqu'au 9 juillet, visant à engager des négociations avec les différents partenaires. L'indice S&P 500 a alors enregistré sa meilleure performance quotidienne (+9,5%) depuis octobre 2008.
Ensuite, chaque menace du président américain a été quasi-systématiquement suivie d'une reculade, le marché qualifiant cette nouvelle stratégie de TACO (pour "Trump always chickens out", que l'on peut traduire par "Trump se dégonfle toujours"), et n'entraînant que peu de volatilité dans le marché.
+ Négociations commerciales en bonne voie +
Même l'ennemi numéro un des Etats-Unis sur le plan commercial, la Chine, n'a pas subi l'avalanche de taxes douanières promise par la Maison-Blanche, dans l'attente des négociations. L'éloignement du risque de récession a soulagé les marchés qui ont rebondi. La signature d'un accord avec Pékin et les avancées avec d'autres pays, dont ceux de l'Union européenne, ont permis à certains marchés boursiers de revenir, à la fin du premier semestre, à leurs plus hauts historiques, comme à Wall Street. "Cette évolution s'explique aussi par la résilience générale de l'économie mondiale et par le peu de signes d'impact des droits de douane sur l'inflation", ajoute Henry Allen.
L'indice S&P 500 et le Nasdaq progressent de 5% depuis janvier, récupérant leurs pertes, grâce notamment aux valeurs technologiques. Celles-ci ont été portées par les achats à bon compte des investisseurs particuliers, notamment. L'exceptionnalisme de la tech américaine semble durer. Mais la performance du marché américain n'est valable qu'en dollar car pour les investisseurs étrangers ce n'est pas la même histoire. A moins d'avoir protégé son portefeuille du risque de change (ce qui est onéreux), la performance est nettement négative en raison de la forte baisse de la devise américaine. Le billet vert a chuté de 12% (indice dollar, calculé à partir d'un panier de devises), affecté par la méfiance des investisseurs non-résidents vis-à-vis de la politique économique et des actifs américains. L'euro a progressé de 15% par rapport à ses plus bas face au dollar.
"L'environnement reste très incertain, a souligné Alexandre Caminade, directeur des gestions taux souverains, émergents et aggregate chez Ostrum AM, lors d'une conférence de presse sur les perspectives du marché obligataire mardi 1er juillet. Malgré cela, tous les actifs risqués ont nettement rebondi, des actions au crédit. Seul le billet vert n'est pas revenu sur ses niveaux d'avant le 'Liberation Day'". "Le déclin continu du dollar américain a constitué un autre facteur important de cette première partie de l'année, l'indice dollar ayant enregistré sa pire performance semestrielle depuis 1973", ajoute Henry Allen.
+ Surperformance éparse de l'Europe +
Malgré ce rattrapage, les marchés boursiers européens ont conservé leur avance par rapport à Wall Street. La perspective d'un renouveau de la croissance en Europe, avec le plan de relance allemand et l'abandon de la règle d'or budgétaire, l'assouplissement monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), quand la Fed était contrainte par la politique commerciale de Donald Trump, et la recherche d'une alternative peu onéreuse à un marché américain devenu trop cher, ont propulsé les marchés européens. Ces derniers ont en outre été portés par le bond des valeurs de défense. L'Europe n'avait pas autant surperformé le marché américain au premier semestre depuis un quart de siècle.
Mais cette surperformance est très déséquilibrée entre un marché allemand au plus haut historique, avec un gain de plus de 20,2% au premier semestre, et une Bourse de Paris à la traîne (+4,1%). Les marchés espagnol et italien profitent de leur forte pondération en valeurs bancaires et utilities, qui ont été deux des secteurs les plus performants en Europe depuis le début de l'année. L'autre grand gagnant du premier semestre est le marché offshore chinois qui a profité du regain d'optimisme sur les valeurs technologiques chinoises et de sa sous-valorisation. L'indice Hang Seng bondit de 20%.
Les investisseurs tablent sur un scénario optimiste où les tarifs douaniers seraient un peu plus élevés que les 10% minimum pour la plupart des pays (de 15% pour l'Union européenne) et de 30 à 40% pour la Chine, entraînant un peu d'inflation et un simple ralentissement de la croissance. De quoi soutenir les marchés actions, malgré des valorisations toujours élevées aux Etats-Unis et dans la moyenne historique en Europe. Les investisseurs semblent désormais davantage s'intéresser aux marchés émergents, dont la Chine, qui sont bien moins valorisés, et devraient profiter de cette accalmie.
+ Soutien monétaire +
La perspective d'un ralentissement aux Etats-Unis, et de baisses de taux de la Fed, a entraîné un resserrement récent des taux américains, malgré les tensions sur la situation budgétaire aux Etats-Unis. "Le marché attend de voir si les prochains chiffres de l'emploi aux Etats-Unis pour juin, publiés ce jeudi, montrent un ralentissement marqué, ce qui pourrait inciter la Fed à être moins restrictive", indique un gérant. Jusqu'à présent, Jerome Powell, le président de la Fed, a affirmé qu'il ne bougerait pas les taux tant qu'il n'aurait pas de visibilité sur l'impact de la politique économique de Donald Trump. Il attend que la poussière retombe sur l'impact des tarifs douaniers. Mais le président américain met la pression en demandant des baisses de taux. Il envisagerait de nommer son successeur d'ici à la fin de l'année. L'un des candidats à la succession de Jerome Powell, Christopher Waller, milite pour des baisses de taux.
Les marchés anticipent désormais davantage de baisses. Le rendement à 10 ans du Treasury en a bénéficié et s'est détendu de 30 points de base (pb) depuis janvier. Le taux à 2 ans a reculé de 50 pb. Le taux à 30 ans reste stable. Pour Alexandre Caminade, le départ en mai 2026 de Jerome Powell n'est pas le premier sujet pour les marchés mais le ralentissement de l'économie américaine, avec de premiers signes dans la consommation sur le marché immobilier. Il surveille également de près le ralentissement du marché du travail qui pourrait conduire la Fed à baisser ses taux plus que ne l'anticipe le marché (un peu plus de deux baisses pour le marché et quatre anticipées par Ostrum). Cela expliquerait la détente des taux longs.
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